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Ailleurs, suivant le sujet et la circonstance, elle se permet des irrégularités que d’ailleurs on remarque à peine, parce qu’elles sont venues d’inspiration. Tantôt on pourrait l’inscrire en des gammes analogues à tel de nos anciens modes grégoriens : ainsi le premier motif de Pelléas, et le thème principal du Quatuor. Ailleurs ce sont les inflexions d’un chromatisme direct, celui du Prélude à l’après-midi d’un Faune ; ou des altérations plus délicates : le cinquième degré de la série usuelle abaissé d’un demi-ton, ou le quatrième élevé d’autant, comme il arrive en plusieurs endroits des Nocturnes. D’autres fois, ce sont des successions de tons entiers, d’une farouche indifférence ; et, plus fréquemment, des échelles incomplètes, où le ton alterne seulement avec la tierce mineure, selon la préférence du goût chinois : ce sont elles qui permettent aux Pagodes, des Estampes, leur parfaite ressemblance ; mais Pelléas, ni les Nocturnes, ni les Proses lyriques, ni le Prélude à l’après-midi d’un Faune, ne les ignorent. C’est d’ailleurs une impropriété de parler de gammes, puisqu’une gamme est une règle. Ici la mélodie change perpétuellement l’ordre et la nature des intervalles. C’est une musique sans gammes, et, en effet, un temps devait arriver où cet appui deviendrait aussi inutile que le soutien du vers régulier pour la poésie ; il suffisait pour