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ARGIRE.

Puisque mon innocence a perdu l’avantage
De se faire connaître à celui qui l’outrage,
Suivez aveuglement votre jalouse humeur :
Argire aime Alexandre, Argire est dans son cour,
Je presse votre haine, et sers votre vengeance,
J’arme votre fureur contre mon innocence ;
Mais je puis mettre fin à mon sort inhumain ;
Puisqu’il me reste encor et mon cour et ma main
Pour punir vos soupçons et me rendre justice,
Je me dois à moi-même un si beau sacrifice ;
Et mon sang soupçonné de cette lâcheté
Brûle de vous montrer quelle est sa pureté.

PORUS.

Dieux un reste d’amour entreprend sa défense
Et dans sa trahison cherche son innocence ;
Ma haine s’affaiblit sous son premier effort :
Je sens qu’elle chancelle, et qu’il se rend plus fort.
Revenez mes soupçons, voyez, voyez qu’Argire
Sur ma rage lassée établit son Empire.
Que ne redonnez-vous à mon cour abattu
Malgré tous ses appas un reste de vertu ?
Vous rendez-vous si tôt à l’éclat de ses charmes,
Et pour me secourir n’avez-vous que des larmes ?