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Lui qui comme un berger se montrait à mes yeux,
Ce rival est un Dieu le plus puissant des Dieux ?
J’espérais éclaircir cette étrange aventure,
Pour convaincre un rival d’une lâche imposture,
C’était là tout l’espoir dont j’osais me flatter,
Et dans cet imposteur je trouve Jupiter ?
Vous deviez prévenir ces mortelles alarmes :
Avec tant de puissance, avec tant de charmes,
Déesse ignorez-vous l’art de vous faire aimer ?
Et que vous manque-t-il pour plaire et pour charmer ?

JUNON.

Mais Prince le moyen que ma beauté l’arrête
Ce Dieu qui va toujours de conquête en conquête.
Rien ne saurait borner ses glorieux soupirs,
Quel objet peut borner de si vastes désirs.
Pour consoler ma gloire et toute ma tendresse,
Tâchons adroitement de perdre sa Maîtresse ;
Sue sa fière beauté par de secrets moyens
Je m’apprête à venger tes feux comme les miens.
Jusqu’ici j’ai voulu par une guerre ouverte,
Par de honteux éclats, entreprendre sa perte ;
Mais le grand Jupiter est plus puissant que moi.
Pour la perdre en secret… D’où te vient cet effroi ?
Tremble-tu des périls d’une ingrate Princesse ?

ALCMÉON.

Toute ingrate qu’elle est excusez ma faiblesse :
J’ai pour sa trahison une secrète horreur,
Et l’amour toutefois règne encore dans mon cœur.

JUNON.

J’ai donc tort de venir avec tant d’imprudence,
Te fier le secret d’une juste vengeance.
Gardant pour ma rivale un sentiment si doux,
Ta faiblesse contre elle augmente mon courroux.