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Mais cette réalité même, dont on parle tant, il l’a cherchée, poursuivie, aimée. Il fit mieux que l’aimer, il la fit aimer.

En nous peignant les orages mêmes de la vie, il semble, en effet, qu’il veuille nous les faire oublier. Chez lui, les pleurs s’effacent vite dans un sourire et l’ironie se fond dans une larme. Il a l’esprit qui touche, parce qu’il a — c’est un mot qui pourrait être de lui — le cœur spirituel.

Son théâtre plaît, comme ses romans, comme plaisait sa personne même. Ses fières jeunes filles, ses cœurs dévoués, fidèles aux souvenirs, inaccessibles aux lâchetés, préférant l’amour à l’argent et l’honneur aux honneurs, ces vertueux et ces vaillants gardent comme un reflet de son âme.

« Il existe, disait-il, un privilège de nature qui m’a toujours semblé tenir le premier rang au commerce des hommes, c’est le don de plaire. J’en dirais volontiers ce que Montaigne disait de la beauté. Comme la beauté, il séduit et entraîne notre jugement ; avec une autorité plus douce et plus sûre que celle du génie, il s’insinue au fond des âmes et n’en trouve pas de rebelles. Heureux qui l’apporte en naissant ! »