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raconté dans leurs livres. Elle était née, en quelque sorte, au sifflement des obus, et elle avait gardé comme une mélancolie intérieure qui ne l’abandonna jamais durant sa vie. N’ayant jamais quitté Phalsbourg, elle y vivait paisiblement, lorsqu’une fois encore le blocus et les obus vinrent l’y trouver. Il semblait que la vieille fille reconnût les bruits affreux qu’elle avait entendus jadis, alors qu’elle ne bégayait même pas. Elle mourut pendant ce second siège, et son existence humble et sainte pourrait s’écrire en deux mots : D’un siège à l’autre.

Ce sont, je le répète, de mâles et sympathiques physionomies de lettrés que celles de ces deux hommes associés pour une œuvre généreuse et qui, dans un temps de facile production, ont gardé une conscience absolue, un dédain des succès frelatés ou de l’argent rapidement gagné, en un mot, cette probité artistique qui est notre vertu et notre noblesse, à nous écrivains. J’en sais un exemple réellement touchant et rare.

Il y a quelques années, les deux collaborateurs venaient d’achever un roman destiné, je crois, au Journal des Débats, et dont je n’ai plus le titre dans la mémoire, un roman tout