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sace ! Lorsqu’ils composèrent le Juif Polonais, ils étaient loin de s’attendre à ce qu’ils deviendraient, un jour, une carte de protestation contre la conquête. Avec quelle émotion on devait revoir, dans cette pièce et dans l’Ami Fritz, ces costumes alsaciens qui sont maintenant des costumes étrangers, et quel charme attristé allait prendre soudain la Valse de Lauterbach, devenue, de par le droit du canon Krupp, une valse allemande ! Le Juif Polonais a pris comme un intérêt nouveau, à cette heure où Faulquemont s’appelle Falkenberg, où Château-Salins devient Salzburg et où Thionville tombe en Diedenhofen. Il faut avouer que cette Alsace et cette Lorraine, dont nous sentons aujourd’hui tout le prix et que nous aimons d’autant plus qu’on nous les arrache, nous ne les avons pas comprises et appréciées comme il le fallait ! Outre que la France est impardonnable de n’avoir pas, depuis deux cents ans, popularisé la langue française en Alsace, nous avons pris soin — tant nous aimions à rire ! — de nous amuser beaucoup de l’accent alsacien et d’en faire, par nos vaudevilles, un élément assuré de comique.

Les Alsaciens, au lieu de nous apparaître