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eux ; les héros accablés, face à face avec l’inutilité de leur héroïsme, la réalité de leur misère, et qui, désespérés, brûlent leur dernière cartouche pour se faire sauter la cervelle au bas de quelque rempart ; les cavaliers qui passent, enfonçant leurs sabres dans les cervelles humaines ; les roues des voitures des états-majors, qui broient, au galop éperdu d’une fuite, les membres des blessés ; les veillées pleines des cris de l’hôpital, les nuits tragiques des veilles de combats ; voilà ce qu’ils ont conté, ce qu’ils ont étudié, ce qu’ils ont vu, ce qu’ils ont fait voir.

Non, leur petit conscrit n’est pas un lâche. Non, leur malédiction de la guerre n’est pas vaine. Non, les patriotes qui souhaitaient jadis la paix pour leur patrie et qui maintenant rêvent sa grandeur reconquise et son intégrité future, non, ceux-là ne peuvent être comparés à ces enragés de cosmopolitisme qui rêvent l’effondrement de la patrie dans une impossible fraternité universelle. Ces Français sont de bons Français.

Sans doute — je dois tout dire — dans Waterloo par exemple, je trouve moi-même que les deux auteurs de l’Histoire d’un Paysan subordonnent un peu trop la communauté à l’indi-