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dont les livres vous donnent des images infidèles, c’est la réalité qui subsiste. Ces hommes sont indestructibles  ; vous les verrez, à soixante ou soixante-dix ans, qui courent toutes les rues de Paris… Eh bien, messieurs, causez un moment avec eux, vous serez étonnés de tout ce qu’il y a d’histoire non écrite ; les choses écrites, c’est la moindre partie, et c’est peut-être la moins digne ; mais il y a un monde de choses non écrites. Et ce monde vit encore, et il ne vivra pas demain, car ils s’en vont tous les jours. »

Ce sont ces vieux — qui s’en vont tous les jours, disait Michelet, il y a trente-six ans, et qui sont partis maintenant, — ce sont ceux-là que M. Erckmann et M. Chatrian ont fait parler, qu’ils ont écoutés, dont ils ont noté les grandes histoires. Il y en avait, de ces gens d’autrefois, dans leurs villages d’Alsace et qui aimaient à conter. C’est ce monde de choses non écrites qu’Erckmann-Chatrian ont recueilli. C’est toute cette histoire non contée qu’ils ont fait passer dans leurs livres. Ils ont mis en pratique le conseil de Michelet. Ils ont dit au passant : « Viens ici, fumons, causons, et dis-moi ta vie ! » Ils ont publié le roman de la grande histoire, ils ont retrouvé le fait divers dans