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rapidement enlever à la critique le reproche d’avoir idéalisé la fille perdue. Après la Dame aux Camélias, il donnait le Demi-Monde, où la baronne d’Ange, cette aventurière, est flétrie avec une virilité souvent cruelle ; et bientôt il nous présentait cet effrayant portrait d’usurière d’amour qui, dans le Père prodigue, laisse échapper sa proie, l’amoureux sénile, contre argent, contre remboursement, pour parler la langue commerciale qui est celle de ses pareilles. Il faut être juste : M. Dumas n’a jamais eu la pensée de donner une auréole aux pécheresses, ou du moins, il s’est vite hâté de faire comprendre — s’il se peut — à notre société moderne, que le monde est menacé de périr parce qu’il n’y a plus d’amour en ce monde, parce qu’il n’y a plus que du prurit et du plaisir. C’est bien là ce qu’il entend dans les Idées de Madame Aubray, lorsqu’il fait dire à Camille Aubray parlant des femmes tombées : « Tous ces jeunes débauchés, tous ces imbéciles, tous ces désœuvrés, tous ces fils de famille qui n’ont pas eu l’idée de donner à ces jeunes femmes un morceau de pain quand elles étaient jeunes, vaillantes, vierges, se laissent prendre plus tard les