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les Lionnes pauvres et le Mariage d’Olympe, en était encore à habiller du velours et de la soie des grands seigneurs padouans du temps passé son drame intime d’une inspiration pourtant bien moderne, l’Aventurière. Enfin « Malherbe vint » et Dumas fils jetait toute vivante et palpitante encore à une foule empressée, enchantée, émue, enthousiasmée, une tragédie en habit noir, la Dame aux Camélias.

C’était quelque chose, vers 1830, que d’arracher au théâtre sa tunique grecque ou romaine devenue souquenille et de la remplacer par un pourpoint neuf ; c’était mieux encore, en 1850, de rejeter le pourpoint usé pour mettre, sur le torse en chair et en os de personnages bien humains, le frac de la vie courante, le morne habit noir, l’uniforme banal de nos joies et de nos douleurs.

Où M. Dumas fils avait-il pris, d’ailleurs, l’inspiration d’un tel drame ? Dans un de ses livres, et ce livre, il l’avait puisé en lui-même, dans ses propres sensations, ses souvenirs et ses souffrances. Il n’y a pas d’autre méthode au monde pour l’artiste. On parle beaucoup de documents humains ; le véritable document pour tout homme qui crée, c’est son propre cœur.