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LES JACQUES

fois, il contemplait les choses avec avidité. Qu’espérait-il y trouver ? Que voulait-il lire, dans ces nuages bleuâtres qui semblaient glacés, autant que l’ambiance où il s’engourdissait.

Il s’y engourdissait à ce point qu’il n’entendit pas un cheval avancer sur le chemin que ses pieds touchaient presque. La bête allait lentement, étant vieille, son cavalier paraissant lourd engoncé de pied en cap dans des fourrures, de sa toque bordée de vair à ses bottes de cuir doublé. Le cheval arriva contre l’homme sans qu’il eut bougé. Ce fut lorsque la bête effarouchée manqua, d’un écart brusque, de désarçonner celui qu’elle portait, que, se retournant, l’homme se redressa.

— Butor ! s’écria le cavalier, qui déjà rouge de froid devint violet de colère, tu as failli me faire jeter bas.

— Oh ! messire de Boisjoly possède trop de science de l’équitation pour choir ainsi qu’un vilain, répondit l’homme d’une voix calme et légèrement railleuse.

Debout, il était de petite taille, mais on sentait que ce corps, maigri de privations, eût pu être svelte et bien pris. Le visage aux traits accentués gardait, dans sa flétrissure prématurée, une expression d’intelligence et d’énergie.

— Insolent ! riposta le cavalier faisant mine de lancer le cheval sur la roche.

— Hé là ! reprit l’homme, prenez garde, messire, la pierre est glissante. Si monseigneur tombait de

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