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Sensations de Nouvelle-France

faisait leur force à eux : tu n’avais pas le « sens pratique ». Deux mots dont on abuse, je le veux bien ; quelque chose de très vulgaire, de très mesquin aussi, j’en ai bien peur, mais qui doit être par contre bien utile, voire nécessaire, puisque c’est cela même qui aujourd’hui est en train de révolutionner le monde. La soupe, vois-tu, la soupe des Puritains accroupis sur ce rivage de Plymouth, c’était là l’important, dans le temps. Et faute de cela, pour t’être tenue le ventre creux et la cervelle farcie de vaines glorioles, la marée montante de tes ennemis, soudain, a fondu sur toi au dépourvu, puis t’a submergé, ne laissant plus debout, de ton antique puissance, que ce groupe de Canadiens-Français de la Province de Québec.

Chère et belle France, tu sais que je nargue, n’est-ce pas ? Oh ! va, comme je t’en aime et t’en admire davantage d’être restée, dans ce Nouveau-Monde, ainsi fidèle à l’atavisme qui te veut fière, désintéressée, même irréfléchie, et d’être tombée, il est vrai, mais du moins avec les honneurs de la guerre, c’est-à-dire en te gardant « toi-même » jusqu’au bout.