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Sensations de Nouvelle-France

nerveuses, et l’on peut pressentir, rien qu’à ces fulgurances d’acier, ce qui sera plus tard l’épopée si belle, et aussi — il faut ajouter — quelque peu Don Quichotte, de la France dans le Nouveau-Monde.

Tout autre est le débarquement des Puritains. Il a neigé, la brise paraît vive, et tout là-bas, dans des horizons troublés, le navire qu’on vient de quitter roule sur son ancre, fouetté par des flots blancs d’écume. Tout ce pauvre troupeau humain vient de descendre à terre, et tous, hommes, femmes, et enfants, semblent partagés entre la joie d’être sains et saufs après une longue traversée, et la sourde inquiétude que leur inspire le premier aspect de cette nature inhospitalière, si âpre et si rugueuse surtout sur ces côtes de Plymouth. Vous vous imaginez sans doute qu’ils vont au moins se jeter à genoux, pour remercier Dieu de leur avoir fait la vie sauve. Ah ! bien, vous vous trompez, et ils ont vraiment à aviser à bien plus pressé que cela. Ce n’est pas, cependant que la foi leur manque — ils l’ont bien prouvé, en bravant la fureur et les édits de Cromwell — non, mais voilà, je le répète, ils ont en ce moment besogne plus pressante, et, en gens pratiques qu’ils sont, ils avisent de suite à l’expédier. Les émotions ont dû les creuser,