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Sensations de Nouvelle-France

hivers figés en des immobilités de néant. Ces trois derniers, l’Europe ne pourrait en offrir de semblables, parce qu’ils sont une floraison naturelle de ce sol qui, s’il a bu autrefois avec avidité le sang des Jogues, des Brébeuf et des Lallemand, a fini aussi par nous communiquer la rage du dieu Dollar. Et jeté, à travers tout cela, le déchaînement des intrigues, des sourdes convoitises, des rancunes sans cesse attisées entre les diverses communautés de réguliers dont le flot monte, monte toujours, couvrant le pays de monastères, s’épandant à l’aise dans cette vallée du St-Laurent que traverse et soulève une foi si vive, si naïve, une foi d’un autre âge. Comme du temps des fameux démêlés entre Jésuites et Récollets, que de scénarios passionnels à tracer, et qui attendent encore leur Sixte Le Tac. Tout un monde, vous dis-je.

Mon interlocuteur feuilletait alors, tout le temps, d’une main fiévreuse, un album de photographies. Il tomba enfin en arrêt sur ce qu’il cherchait, et, me montrant du doigt la figure d’un vieillard aux traits dignes et austères : —

« Tenez, fit-il, vous en ferez, du pays, en