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avait élus envers et contre le gré des Broglie et des Buffet abandonnèrent les couloirs et gagnèrent les bancs de l’éphémère édifice expressément construit naguère, inauguré ce jour-là. Quasi religieux, un grand silence y régnait. Tout à coup, en dehors de l’enceinte, où devaient être débattus les droits si longtemps contestés et toujours méconnus de la nation, hier serve encore et demain peut-être souveraine, un long roulement retentit… Au banc ministériel, les récents titulaires étreignaient leurs portefeuilles si difficilement acquis et déjà fuyants. Suivi des plus jeunes membres de l’Assemblée appelés, selon le règlement en vigueur, à composer le bureau provisoire, un vieillard, auréolé de cheveux blancs, vêtu de noir et la boutonnière vierge de toute marque d’intrigue ou de bassesse, apparut. Tandis que les tambours, sous le vestibule, battaient aux champs, il monta gravement au fauteuil présidentiel. Aussitôt qu’il s’y fut assis, il considéra d’un regard bref et vif la délégation nationale qu’il avait à présider, ce jour-là seulement, par bénéfice d’âge… Un sourd brouhaha s’élève soudain parmi la minorité clairsemée qui siégeait à droite et vers le centre ; mais les gauches en masse éteignent immédiatement cet hostile murmure et par trois fois poussent ce cri sacré :