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cela frères ennemis ? Comme vous, il avait grandi aux prises avec l’adversité, victime des injustices sociales ; et comment pouvait-il être, lui, l’enfant de la rue, le gosse avec qui l’on avait partagé les tartines maigres et les billes gagnées à la bloquette, comment pouvait-il être un réactionnaire ! un ennemi de la Commune ! » Et se frappant la poitrine à la place où tout le monde a un cœur, il vous achevait en disant : Mais je donnerais mon sang pour la République !

J’ai vu des gardes s’attendrir au point de prendre fait et cause pour l’inculpé, et dire avec des larmes dans la voix : C’est une infamie d’arrêter de bons citoyens comme ça !

Que voulez-vous, on n’est pas de bois ; malgré soi, et bien qu’on y eût été déjà pris, on se creusait l’esprit pour se rappeler où, et dans quelle circonstance on avait bien pu rencontrer ce pistolet là, et il arrivait que, malgré soi encore, on finissait par lui trouver un air convaincu et bon enfant tout de même.

Ajoutez qu’il ne manquait pas, s’il était marié, de vous apitoyer sur le sort de sa femme et de ses enfants ; ou, s’il était célibataire, sur le sort de sa vieille bonne femme de mère qui allait se trouver seule au monde si on lui enlevait le dernier être qui lui restât.

On croit peut-être que j’exagère ? Eh bien, non, je suis encore loin de la vérité.

On ne peut pas s’imaginer combien ces gens-là étaient lâches, cabotins et hypocrites lorsqu’ils étaient en notre pouvoir et avec la perspective