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MADAME ROLAND

Le graveur Phlipon avait déjà écrit à M. de la Platière une lettre pleine de fautes d’orthographe, mais aussi de repentir, et d’un ton excellent. M. de la Platière voulait bien le recevoir à merci et Sophie Cannet voyait arriver l’annonce brusque d’une nouvelle que rien — hormis quelques soupçons — n’avait pu lui faire prévoir.

Je n’oublie pas, ma bonne amie, disait Manon, que c’est par toi que j’ai connu, etc…

C’était peu.

Le contrat fut passé le 27 janvier 1780, les publications affichées le 30 et le mariage eut lieu, sans aucun apparat, le 4 de février à l’église Saint-Barthélemi. Dom Pierre Roland, curé de Longpont, était témoin de son frère et Sélincourt de Manon qui était revenue chez son père, quelques jours auparavant, pour aller de là à l’église.

Le nouveau ménage s’installa chez Phlipon mais n’y resta pas longtemps[1]. Dès le lendemain de la cérémonie, c’est Mme Roland qui écrit à Cousin-Despréaux, le plus intime ami de Roland, pour lui annoncer le mariage. Roland n’ajoute que quelques lignes familières terminées par ces mots : « J’ai cherché le bonheur. J’y crois. »

Mme Roland reprend la lettre et, dans un post-scriptum, fait observer à Cousin-Despréaux que la publication des Lettres d’Italie, dont il s’est chargé, tarde beaucoup et que « l’auteur s’en affecte ».

Tant que dura leur vie commune, — du premier jour au dernier, les documents le prouvent — les époux gardèrent ainsi l’habitude d’écrire ensemble. De plain-pied, Mme Roland était entrée dans le rôle d’une collaboratrice modeste, entièrement dévouée aux intérêts d’un homme supérieur.

  1. Sans doute à cause de l’exiguïté de l’appartement.
    Le 12 mars suivant, Roland écrivait à son ami Cousin-Despréaux qu’il logeait rue Saint-Jacques, à l’hôtel de Lyon.