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génie supérieur qui s’en sont occupés successivement, et à diverses époques. L’usage du chant et de la danse, qui remonte à l’origine des sociétés, fut le premier véhicule à l’art d’ébaucher le jargon des hommes. Ces exercices, qui étaient leurs seules amusemens, leur inspirèrent l’idée, leur firent même un besoin d’ajouter aux mots de leur langue rustique, certaines formes, certaines syllabes accessoires, et d’en relever les expressions par une sorte de cadence ou de nombre qui les mît en harmonie avec les modulations de la voix et les mouvemens du corps.

Ceux qui s’occupèrent ainsi à donner du rhythme aux paroles, à y introduire les ornemens et les grâces de la rime, furent les premiers grammairiens de l’antiquité ; on les appelait chez les grecs ποιηταί, pluriel de ποιητής (poète, qui fait, qui compose).

Chez les Arméniens ils étaient connus, tantôt sous le nom de Panasdéghds, Բանաստեղձ (qui invente des paroles, ou des locutions), tantôt sous celui de Kértogh քերթող, qui signifie à-la-fois un poète et un grammairien. En effet, le père de la poésie grecque (Homère) est honoré toujours par les écrivains de l’Arménie du titre de premier et de plus habile grammairien de l’antiquité[1]. Les poètes ont donc été les plus anciens auteurs, les premiers hommes qui aient laissé à la postérité quelques productions d’esprit, quelques règles ou modèles sur l’art de parler. Leurs ouvrages impro-

  1. Voyez le manuscrit arménien de la Bibliot. du Roi, no 127, feuil. 33.