Page:Cirbied - Grammaire de Denys de Thrace, 1830.djvu/35

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XXXII

suite à augmenter leurs connaissances, l’auteur arménien s’exprime ainsi :

« L’esprit humain trouve toujours de nouveaux charmes à examiner et à comparer ensemble les manières de parler de plusieurs peuples. Tous les idiomes sont dérivés d’un jargon primitif mais extrêmement divisés et distingués entre eux par des propriétés particulières. Le Grec est doux, le Romain véhément, le Hun, menaçant, le Syrien, suppliant, le Persan, plein d’abondance, l’Alain, superbe ; le Gothique, plaisant ; l’Égyptien, guttural ; l’Indou, gringottant comme les oiseaux ; l’Arménien savoureux et en même temps analogique, car il renferme en lui seul les propriétés de la plupart des langues. Lorsque nous comparons ensemble deux couleurs, deux figures, deux tailles d’homme, deux compositions d’esprit, ou deux actions éclatantes, nous saisissons facilement le genre de supériorité de l’une sur l’autre. On ne saurait de même apercevoir les beautés particulières d’une langue, qu’en la comparant à d’autres. C’est en effet par l’étude et par la comparaison que les langues peuvent recevoir et se prêter mutuellement des secours de toute espèce, surtout lorsqu’il s’agit de connaître l’origine des mots et leur étymologie, car dans pareille circonstance, le jargon même le plus barbare peut être de quelque utilité[1]. »

  1. Le même manuscrit, No 127, feuillets 29 et 30.