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De la physique, Cicéron passe à ce qui en était pour les épicuriens le complément nécessaire, à la logique. La logique épicurienne, selon lui, est tout à fait insuffisante ; pour mieux dire, elle consiste dans la suppression même de la logique, en tant que science de la raison et du raisonnement : ne fait-elle pas les sens seuls juges de la vérité[1] ?

Enfin vient le tour de la morale épicurienne, qui montrait dans le plaisir la fin unique de l’homme : C’était là le point fondamental du système, et la physique et la logique épicuriennes n’avaient qu’un but, celui de confirmer, par la connaissance de la nature des choses et de la nature de la pensée, la connaissance de la nature du bien, qui réside dans le plaisir. Cicéron reproche à la morale épicurienne son manque d’originalité : c’est la doctrine d’Aristippe altérée. Si Aristippe et Épicure s’accordent à affirmer que chacun ne recherche et ne doit rechercher que son plaisir, il est une autre affirmation que n’hésite pas à formuler le sens commun de tous les hommes : chacun recherche et doit rechercher un bien supérieur au plaisir. À ce sujet Cicéron cite divers exemples de désintéressement : sans cesse les héros de la vieille Rome ont sacrifié leur plaisir à leur devoir ; sans cesse encore, dans les moindres actions de la vie, chacun de nous préfère aux plaisirs grossiers les jouissances désintéressées de l’étude et de la science[2].

Après cette exposition rapide et cette critique non moins rapide du système épicurien, Cicéron s’arrête : au fond, il n’avait d’autre but, nous le savons, que de provoquer la discussion et de la transporter sur un ter-

  1. L. I, ch. vii, 22.
  2. L. I, ch. vii, 23, 26.