Page:Cicéron - Des suprêmes biens et des suprêmes maux, traduction Guyau, 1875.djvu/55

Cette page n’a pas encore été corrigée

et, en mettant le souverain bien dans la volupté, premièrement il s’est fort trompé ; en second lieu il n’a rien dit qui vînt de lui, et il a tout emprunté d’Aristippe, qui l’avait mieux exprimé. Enfin, dites-vous, c’était un ignorant.

— Il est impossible, repris-je, ô Triarius, que, quand on diffère d’opinion avec un autre, on n’assigne pas le motif de cette différence ; car qui m’empêcherait d’être épicurien, si j’approuvais les opinions d’Épicure, qu’on peut apprendre en se jouant ? Il ne faut donc pas trouver mauvais que ceux qui disputent ensemble parlent l’un contre l’autre pour se réfuter. Mais on doit bannir de la discussion l’aigreur, la colère, l’emportement, l’opiniâtreté, qui sont en effet indignes de la philosophie.

— Vous avez raison, dit Torquatus ; il est impossible de disputer sans blâmer le sentiment de son adversaire. Mais ce qui n’est pas permis, c’est la chaleur et l’entêtement. Au reste, si vous le trouvez bon, j’aurais quelque chose à répondre à ce que vous avez dit. — Croyez-vous donc, lui répliquai-je, que j’aurais tenu ce langage, si je n’avais eu envie de vous entendre ? — Eh bien ! reprit-il, aimez-vous mieux parcourir ensemble toute la doctrine d’Épicure, ou ne parler que de la seule volupté dont il est maintenant question ? — A votre choix, lui répondis-je. — Alors, dit-il, je m’arrêterai à ce seul objet, qui est de la plus haute importance ;