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l’invention des coupes. Toutes ces découvertes, qui sont la suite du besoin et le fruit de l’expérience, on peut croire qu’elles ont été fuites en vue de notre utilité. Mais il n’en est pas de même des objets dont l’usage n’a été trouvé que longtemps après leur naissance, tels que nos membres et nos organes. Ainsi tout nous défend de croire qu’ils ont été faits pour notre usage.

XLIII
L’AME, CAUSE MOTRICE.

Mais d’où nous vient la faculté de marcher quand nous le voulons, et de mouvoir nos membres de différentes manières ? Quel est l’agent accoutumé à pousser en avant une masse aussi lourde que celle de nos corps ? C’est ce que je vais l’expliquer ; redouble d’attention. Il faut avant tout, comme nous l’avons dit, que les simulacres qui invitent au mouvement viennent frapper l’esprit. De là naît la détermination : car on ne se met en devoir d’agir qu’après que l’âme a connu l’objet de sa volonté, et elle ne connaît rien que grâce à la présence des simulacres. L’esprit, ainsi déterminé, annonce sa volonté par un mouvement qui se communique aussitôt à l’âme, disséminée dans tous les membres, et rien n’est plus aisé, puisque ces deux substances sont infiniment unies. Le contre-coup de l’âme se fait sentir au corps, et ainsi toute la masse commence à se mouvoir et à s’avancer peu à peu.

XLIV
DU SOMMEIL ET DES SONGES.

Maintenant comment le sommeil verse le repos dans nos membres et bannit l’inquiétude de nos âmes, c’est ce que je vais t’expliquer en peu de vers, mais en vers harmonieux ; les faibles accents du cygne flattent plus l’oreille que les cris perçants dont les grues remplissant les airs. De ton côté, prête-moi une oreille attentive et un esprit appliqué, pour ne point nier les faits dont je te démontrerai la possibilité,