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cture avec la connoissance qu’ils ont des choses mesmes, laquelle on ne leur peut donner que par la traduction Françoise, qui le leur apprenne. C’est pourquoy il est fort important qu’ils commencent par apprendre le François de leurs Livres, avant que d’en lire le Latin ; parce que le François leur fera bien plutost comprendre cét usage & cette proprieté, par la comparaison qu’ils en feront avec la traduction Françoise, qu’ils sçauront déja…

Il faut donc que les enfans apprennent par ces traductions Françoises, un mediocre usage de leur Langue naturelle, qui consiste dans la pureté des mots, & de leur combinaison, & dans la netteté du stile & des expressions communes & familieres ; c’est pourquoy il ne les faut pas faire lire plusieurs Livres François de divers stiles, & sur tout ceux qui sont d’un mauvais langage : car cela les rendroit incapables de bien discerner ce qui est bon d’avec ce qui est mauvais : ainsi qu’il arrive aux personnes qui s’accoustument à toutes sortes de vins, lesquels ils ne peuvent plus bien gouster, ny connoistre leurs differences : & il ne faut nourrir leur esprit que de choses délicates & spirituelles, si l’on veut leur donner un goust délicat & spirituel. C’est pourquoy on commet une grande faute en les faisant lire indifferemment toutes sortes d’Autheurs, aussi bien Latins que François, &