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quand elle n’est pas fondée en raison, n’est qu’une ancienne erreur. C’est le vuide de ces jugements anticipez, qu’il faut faire dans l’esprit des hommes, pour y établir la verité. Magna res est sapientia, vacuo illi loco opus est. Car comment y pourroit-elle entrer ; quand la fausseté y a tout remply ? C’est pourquoy on ne devroit commencer à apprendre les Sciences, quelles qu’elles fussent, qu’apres avoir desapris les erreurs, dont nous avons esté prévenus dés nostre enfance. J’estime que si l’on prend la peine de joindre ce que j’ay dit ailleurs, avec ce que je diray icy, on en pourra former une Methode facile & naturelle pour montrer aux enfans tout ce qu’on veut leur montrer sur le sujet des Langues ; mais je supplie tous ceux qui liront cette Preface, de me pardonner la liberté queje prens, de dire mes sentiments touchant cette matiere, puis que je ne desire estre crû, qu’aurant qu’on les trouvera raisonnables & utiles à la jeunesse.

Je dis donc en premier lieu, que c’est une faute tres-grande, que de commencer, comme on fait d’ordinaire, à montrer à lire aux enfans par le Latin, & non par le François. Cette conduite est si longue & si penible, qu’elle ne rebute pas seulement les Escoliers de toute autre instruction, en prévenant leur esprit dés leur plus tendre jeunesse, d’un dégoust & d’une haine presque in-