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DES LOIS, LIV. II.

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Inxe, qui doit être éloigné. Pourquoi, en effet, nous qui voulons que dans le commerce des hom- mes la pauvreté soit l’égale de la richesse , en in- troduisant la dépense dans le culte, fermerions- nous à la pauvreté l’accès des Dieux, surtout quand rien ne doit être moins agréable à un Dieu que de voir que la porte n’est pas ouverte à tous pour l’apaiser et l’adorer ? Ensuite, un Dieu vengeur tient ici la place d’un juge, pour que la religion trouve une garantie dans la crainte d’une peine présente.

Si chacun adorait des Dieux à lui, soit nou- veaux, soit étrangers, il y aurait confusion des religions, il y aurait des cérémonies inconnues, et non réglées par les prêtres ; car, du reste, le culte des Dieux que l’on a reçus de ses pères est permis, s’ils se sont eux-mêmes conformés à la présente loi. — Je veux que les temples restent clans les villes, où les avaient placés nos aïeux ; et je n’imite point les mages de Perse , sur le con- seil desquels on dit que Xerxès brûla les temples de la Grèce, parce qu’on y renfermait dans des murs les Dieux, à qui tout doit être ouvert et libre, et donttout cet univers est letempleet la demeure.

XI. Les Grecs et nos pères ont mieux fait : pour augmenter la piété envers les Dieux , ils ont voulu qu’ils fussent habitants des mêmes villesque nous. Cette opinion introduit en effet dans la cité même la religion qui lui est si utile, selon le sens du moins de cette parole du savant Pythagore , que jamais la piété et la religion ne remplissent plus les âmes que lorsque nous sommes occupés du service divin ; et de cette autre de Thaïes, le plus sage des sept sages, qu’il faut que les hommes pen- sent que tout ce qui frappe les regards est rem- pli des Dieux, et qu’alors ils deviendront plus

chastes, comme s’ils étaient toujours dans le plus sacré des temples ; car, suivant une certaine croyance, les Dieux n’apparaissent pas seulement à l’esprit, ils ont une présence. Les mêmes raisons nous font placer aux champs les bois sacrés ; et ce culte, transmis par nos aïeux, tant aux maî- tres qu’aux serviteurs, qui se célèbre en vue du champ et de la maison , ce culte des Lares ne doit pas être oublié.

Garder les rites de sa famille et de ses pères , c’est garder une religion pour ainsi dire de tradi- tion divine ; car l’antiquité se rapproche des Dieux.

Quand la loi prescrit le culte de ceux d’entre les hommes qui ont été sanctifiés , comme Her- cule et les autres, elle indique que si les âmes de tous sont immortelles, celles des bons et des forts sont divines. Il est bien que la raison, la piété, la force, la foi, soient consacrées par l’homme : ainsi Rome leur a dédié des temples, afin que ceux qui les possèdent (et tout homme de bien les possède) croient que leur âme est habitée par des Dieux. Ce qui est mauvais, c’est ce qu’on fit à Athènes, lorsque après l’expiation du crime de Cylon , sur le conseil d’Épiménide de Crète, on éleva un temple à l’Affront et à l’Impudence ; ce sont les vertus et non les vices qu’il faut consa- crer. Un autel antique est dressé, sur le mont Pala- tin, à la Fièvre ; un autre, sur l’Esquilin, à la Fortune mauvaise et maudite : tous les monu- ments pareils doivent être proscrits. S’il faut in- venter des surnoms, il faut plutôt en choisir qui expriment la victoire et la conquête, comme Vicepola ; l’immutabilité, comme Stata ; ou des surnoms tels que ceux de Jupiter Stateur et In- vaincu ; ou bien que ce soient les noms de choses

movendum. Quid est enim , quum pauperlatcm diviliis etiam inler hominos esse aequalem velimus, cur eam, sumtu ad sacra addito , deornm aditu arceamus ? prseser- tim quum ipsi deo uihil minus gratum futurum sit, quam non omnibus palere ad se placandum et colendum viam. Quod autem non judex, sed deus ipse vindex constituiiur, prsesentis pœnœ metu religio confirmari videtur.

Suosque deos , ant novos , aut alienigenas coli , eonfn- sionem liabet religionum , et ignotas caerimonias non a sacerdotibus. Nam a patiïbus acceptes deos, ita placet coli , si huic legi paruerint ipsi. — Patrum delubra esse in urbibus censeo : nec sequor magos Persarum , quibus auctoribus Xerxes inflammasse templa Graecia ? dicitur, quod parietibus includerent deos, quibus omnia deberent esse patenlia ac libéra , quorumque liic mundus omnis templum esset et domus.

XI. Melius Gra’ci , atque nostri : qui , ut augerent pie- tatem in deos , easdem illos, quas nos , urbes incolere vo- Iuerunt. Affei t enim haec opinio religionem utilem civita- tibus : si quidem et illud bene dictum est a Pytbagora , doctissimo viro , tum maxime et pielatem et religionem versari in animis, quum rébus divinis operam daremus ; et quod Thaïes, qui sapientissimus in septem fuit, homi- nes existimare oportere , omnia quœ cernerenlur, deorum

CICÉRON.— TOME IV.

esse plena ; fore enim omnes castiores , veluti qui in fanis essent maxime religiosis. Est enim quadam opinione species deomm in oculis, non solum in mentibus. Eamdemque rationem luci habent in agiïs. Neque ea, quae a majoribus prodita est quum dominis , tum famulis, posita in fundi villa^que conspectu, religio Larum, repudianda est.

Jam ri t u s familiae patrumque servare, id est (quoniam antiquilas proxime accedit ad deos) a diis quasi traditam religionem tueri.

Quod autem ex homintim génère consecratos, sicut Herculem , et ceteros , coli lex jubet , indicat omnium qui- dem animos immorlales esse , sed fovtium bonorumque divinos. Bene vero, quod Mens, Pietas, Virtus, Fides consecratur manu : quarum omnium Piomae dedicata pu- bliée templa sunt , ul illa qui babeant (habent aulem omnes boni) , deos ipsos in animis suis collocatos putent. Nam illud vitiosum, Athenis quod, Cylonio scelere expiato, Epimenide Crète suadente, fecerunt Conlumeliœ fanum etlmpudentiae. Virtu tes enim, non vilia consecrare decet. Araque vêtus stat in Palatio, Febris ; et altéra Esquiliis, malae Fortunée, detestaUeque : quœ omnia ejusraodi re- pudianda sunt. Quod si lingenda Domina , Vicepotae potius vincendi alque potiundi, Stata3 slandi, cognominaque Statoris et Invicti Jovis ; rerumque expetendarum Domina,