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CICÉRON.

la cause du peuple, mais celle des gens de bien. Id., xii, 4. On ne résiste pas facilement à un peuple puissant, soit qu’on ne lui accorde aucun droit, soit qu’on lui en donne trop peu. Priscien, xv, 4, 20. Fassent les Dieux, pour son bonheur, que ma prédiction soit vraie ! Nonius, vii, 7.

IX. C’est en vain que Cicéron s’écriait en parlant des poètes : Quand ils sont couverts d’applaudissements et excitent l’enthousiasme du peuple, que leur vanité regarde comme un si grand maître et un juge si éclairé, quelles ténèbres ils répandent sur les esprits ! quelles terreurs ils font naître ! que de passions ils enflamment ! Saint Augustin, de Civit. Dei, ii, 14. Cicéron dit qu’alors même qu’il vivrait deux fois l’âge d’un homme, il n’aurait pas un moment pour lire les poètes lyriques. Sénèque, Ep. 49.

X. Scipion dit dans le traité de la République : Comme nos ancêtres attachaient une idée déshonorante à la profession de comédien et à la vie d’un homme de théâtre, ils voulurent que ces sortes de gens fussent privés des honneurs du citoyen romain ; et plus encore, que le censeur les chassât ignominieusement de leur tribu. Saint Augustin, de Civit. Dei, ii, 13. Cicéron nous fait connaître le sentiment des anciens Romains sur le théâtre dans ses livres de la République, où Scipion s’exprime ainsi : « Jamais la comédie, si les mœurs ne l’avaient autorisée, n’aurait pu faire applaudir sur le théâtre ses infâmes licences. Les anciens Grecs affichaient au moins ouvertement leur goût dépravé ; chez eux une loi permettait à la comédie de tout dire et de nommer tout le monde. » Aussi l’Africain ajoute-t-il : « Quel homme n’a-t-elle pas atteint ? sur qui n’a-t-elle pas frappé ? qui a-t-elle épargné ? Elle s’est attaquée, me dira-t-on, à d’indignes flatteurs du peuple, à des méchants, à des citoyens séditieux ; elle a déchiré un Cléon, un Cléophonte, un Hyperbolus. On ne peut lui en savoir mauvais gré ; quoiqu’il eût mieux valu que de tels hommes fussent notés par un censeur que par un poëte. Mais que Périclès, un si grand capitaine, un si fameux politique, l’âme et la gloire de sa patrie depuis tant d’années, ait été outragé dans des vers et ces vers récités sur la scène, cela n’est-il pas aussi révoltant que si Publius et Cnéius Scipion eussent été publiquement calomniés par Plaute ou Névius, et Caton par Cécilius ? » Et quelques lignes après : « Nos lois des douze Tables, au contraire, qui prononcent en si peu de cas la peine capitale, ont voulu que le dernier supplice fût infligé à celui qui réciterait publiquement ou composerait des vers injurieux et diffamatoires. Rien de plus sage ; car notre vie doit être soumise au jugement des magistrats, à leurs sentences légitimes, et non aux fantaisies des poètes ; et s’il est permis de nous attaquer, c’est à la condition que nous puissions répondre et nous défendre devant un tribunal. » J’ai pensé que je devais reproduire ici ce passage du quatrième livre de la République, en supprimant toutefois quelques détails et en donnant un autre tour à quelques idées, pour en rendre l’intelligence plus facile. Cicéron ajoute encore de nouveaux développements, et termine en montrant que les anciens Romains ne voulaient qu’aucun homme vivant fût loué ou blâmé