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qu’elle a été mieux gouvernée par les anciens Romains que par les nouveaux. De Civil. Dei, ii, 2l.

II. Voici le moment de démontrer le plus brièvement et le plus clairement possible, comme j’ai pris l’engagement de le faire au second livre de cet ouvrage, que, suivant les définitions proposées par Scipion dans la République, il n’y a jamais eu de société politique à Rome. Il définit en quelques mots la république la chose du peuple, et le peuple une société formée sous la garantie des droits et dans un but d’utilité commune. Il explique ce qu’on doit entendre par garantie du droit, en montrant qu’un gouvernement ne peut donner cette garantie à un État sans la justice. Où la vraie justice ne règne pas, il n’y a donc pas de droit. Ajoutons encore que ce qui est conforme au droit se fait justement, et ce qui se fait injustement est contraire au droit. On ne doit pas regarder comme des droits les iniques conventions des hommes ; car les Romains eux-mêmes disent qu’il n’y a de droit que celui qui découle de la justice comme de sa source, et qu’il est très-faux de soutenir, avec certains esprits mal faits, que le droit, c’est tout ce qui convient au plus fort. Ainsi donc, dans un État où la vraie justice ne règne pas, il n’y a point de société établie sous la garantie du droit ; par conséquent il n’y a point de peuple tel que Scipion et Cicéron le définissent ; et s’il n’y a point de peuple, il n’y a point de chose du peuple ; l’État devient la chose de je ne sais quelle multitude, indigne du nom de peuple. Nous voyons enfin que si la république est la chose du peuple, le peuple une société formée sous la garantie du droit, et que si le droit disparaît avec la justice, il faut en conclure nécessairement que là où la justice ne règne pas, il n’y a point de république. Quant à la justice, c’est cette vertu qui rend à chacun ce qui lui appartient. De Civit. Dei, xix, 21.


LIVRE QUATRIÈME


I. [Je vais essayer, puisque j'ai parlé du corps et de l'âme, d'expliquer, autant que l'insuffisance de mon esprit le permettra, en quoi l'un et l'autre consistent. C'est une tâche que je crois d'autant plus nécessaire d'entreprendre, que Cicéron, ce grand génie, l'a abordée lui-même dans le quatrième livre de la République, et a réduit aux plus étroites proportions un sujet si vaste, dont il effleure à peine les sommités. Et qu'on ne croie pas qu'il a laissé volontairement son ouvrage imparfait; il atteste lui-même qu'il y a apporté tout le soin possible. Dans le premier livre des Lois, où la matière est encore superficiellement touchée, il dit: C'est là un sujet qui a été, ce me semble, assez complètement traité par Scipion dans les livres que vous avez lus.] Lactance, de Opif. div., i. [Et l'intelligence elle-même qui prévoit l'avenir se souvient du passé.] Nonius, ix, 8. Voici une belle pensée de Cicéron: S'il n'est pas un homme, dit-il, qui n'aimât mieux mourir que de revêtir la figure d'un animal, tout en conservant une âme humaine, quel plus grand malheur n'est-ce pas que de cacher sous la figure d'un homme l'âme d'une bête féroce? Autant l'âme l'emporte sur le corps, autant, à mon avis, ce second destin est plus cruel que le premier. Lactance, v, 11. [Cicéron dit quelque part qu'il ne croit pas que le souverain bien soit le même pour un bé-