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CICÉRON.

bre de sons dissemblables ; ainsi de l’alliance des différents ordres de l’État et de leur juste tempérament résulte ce concert politique qui naît, comme l’autre, de l’accord des éléments les plus opposés. Ce que l’on nomme harmonie dans la musique, dans l’État c’est la concorde, le lien le plus parfait de la société humaine, la garantie la plus sûre de la force des États. Mais sans la justice, la concorde est impossible…

XLIII. [Lorsque Scipion eut exposé avec une certaine étendue combien la justice, est utile aux États et combien leur nuit l’injustice, Philus, un de ceux qui étaient présents à la discussion, prit la parole, et demanda que cette question fût approfondie, et que l’on présentât de nouvelles raisons en faveur de la justice, à cause de cette maxime, déjà fort répandue, Qu’il n’y a pas de gouvernement possible sans injustice.] S. Augustin, de Civ. Dei., ii, 2l.

XLIV. Scipion : je me rends très volontiers à votre désir, et je vous déclare même que nous n’avons rien dit jusqu’ici sur la république qui ne tombe à néant, et qu’il nous serait impossible de rien ajouter s’il ne demeure parfaitement établi, non seulement qu’il est faux de prétendre qu’on ne puisse gouverner sans injustice, mais qu’il est de toute vérité que sans une extrême justice il n’y a plus de gouvernement possible. Mais, si vous le trouvez bon, c’est assez pour aujourd’hui ; remettons la suite à demain, car il nous reste encore beaucoup de choses à dire. On se rangea à l’avis de Scipion et l’entretien de ce jour fut terminé.


LIVRE TROISIÈME

ARGUMENT TIRÉ DE SAINT AUGUSTIN.

Cité de Dieu, L. II, C. 21.

Le troisième livre s'ouvre par un grand débat. Philus soutient l'opinion de ceux qui pensaient que l'on ne peut gouverner les hommes sans injustice. Il se défend avec force de partager lui-même un tel sentiment; mais il prend en main la cause de l'injustice contre la justice, et il essaye de prouver par des raisons vraisemblables et par l'expérience que la première est utile au gouvernement des États, tandis que la seconde leur est entièrement inutile. Alors Lélius, à la prière de tout le monde, entreprend de défendre la justice, et démontre par tous les moyens possibles que rien n'est plus funeste aux sociétés que l'injustice, et que, sans un grand respect pour la justice, il est absolument impossible aux États de se gouverner et de vivre. Cette question suffisamment éclaircie, Scipion revient au sujet principal de l'entretien; il rappelle et met dans tout son jour la définition qu'il avait donnée de la république, selon lui la chose du peuple; il dit que l'on doit entendre par peuple non pas toute réunion d'hommes, mais une société formée sous la garantie du droit et dans un but d'utilité commune. Il montre combien les définitions sont utiles dans tout débat; et de celles qu'il a établies il conclut qu'un État est vraiment conforme à son institution, et se montre bien la chose du peuple, quand il est gouverné équitablement et sagement, ou par un roi, ou par quelques ci-












CICÉRON. LIVRE TROISIEME

ARGUMELIRE DE SAINT AUGUSTIN. Cité de Dieu, L. IT, C. 21.



  • isieme livre s'ouvre par un grand dé-

bat. Philus soutient l'opinion de ceux qui pen- aient que lon ne peut gouverner les hommes sans injustice. Il se défend avec force de partager lu e un tel sentiment; mais il prend en main la cause de l'injustice contre la justice, et ilessaye de prouver par desraisons vraisemblables et par l'expérience que la première est utile au gouvernement des Etats, tandis que la seconde leur est entièrement inutile. Alors Lélius, à la prière de tout le monde, entreprend de défendre la justice , et démontre par tous les moyens pos- sibles que rien n'est plus funeste aux sociétés que l'injustice, et que, sans un grand respect pour la justice, il est absolument impossible aux États de se gouverner et de vivre. Cette question suffi- samment éclaircie, Scipion revient au sujet prin- cipal de l'entretien ; il rappelle et met dans tout son jour la définition qu'il avait donnée de la ré- publique, selon lui la chose du peuple ; il dit que l'on doit entendre par peuple non pas toute réu- nion d'hommes , mais une société formée sous la garantie du droit et dans un but d'utilité com- mune. Il montre combien les définitions sont uti- les dans tout débat; et de celles qu'il a établies il conclut qu'un Etat est vraiment conforme à son institution, et se montre bien la chose du peuple, quand il est gouverné équitablement et sagement, ou par un roi, où par quelques ci-