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CICÉRON.

des féciaux, qui sanctionna cette institution si parfaitement juste ; toute guerre qui n’avait point été déclarée suivant ces formalités fut réputée dès lors injuste et sacrilége. Mais remarquez, je vous prie, avec quelle sagesse nos rois surent comprendre qu’il fallait accorder certaines prérogatives au peuple ; j’aurai beaucoup de preuves à vous en citer : en ce moment nous voyons Tullus ne pas oser prendre les insignes de la royauté sans le consentement du peuple, lui demander le droit de se faire précéder de douze licteurs avec leurs faisceaux… (LACUNE)

XVIII. Lélius… Dans votre discours, Scipion, la république ne s’avance pas lentement vers la perfection, elle y vole. — Scipion : Après la mort de Tullus, le peuple choisit pour roi Ancus Marcius, petit-fils de Numa par sa mère ; Ancus fit, comme ses prédécesseurs, sanctionner sa puissance par une loi que votèrent les curies. Il vainquit les Latins et les reçut dans la cité romaine. Il enclava dans la ville les monts Aventin et Célius, fit le partage des terres qu’il avait conquises, déclara propriété publique les forêts voisines de la mer, dont la victoire l’avait rendu maître ; fonda une ville à l’embouchure du Tibre et y envoya une colonie. Après avoir ainsi régné vingt-trois ans, il mourut. — Lélius : Voilà un roi qui mérite encore nos éloges ; il faut avouer cependant que l’histoire romaine est obscure, puisque nous connaissons la mère d’Ancus et que nous ne savons quel était son père. — Scipion : Vous avez raison, mais pour tous ces temps, il n’y a guère que les noms des rois qui soient bien connus.

XIX. Pour la première fois, à cette époque, nous voyons une civilisation étrangère pénétrer dans Rome. Ce n’est pas un faible ruisseau qui s’introduit dans nos murs, mais un fleuve qui nous apporte à grands flots les lumières et les arts de la Grèce. Démaratus, un habitant de Corinthe, qui par son rang, son crédit, ses richesses, était sans difficulté le premier citoyen de l’État, ne pouvant souffrir la tyrannie de Cypsélus, s’enfuit avec de grands trésors, et vint s’établir à Tarquinies, une des villes les plus florissantes des Étrusques. Apprenant que la domination de Cypsélus s’affermissait à Corinthe, cet homme indépendant et énergique renonça pour jamais à sa patrie, se fit admettre au nombre des citoyens de Tarquinies, et fixa dans cette ville son établissement et son séjour. Il s’allia à une famille de ce pays, eut de son épouse deux fils qu’il éleva dans toutes les perfections de l’éducation grecque… (LACUNE)

XX… On lui conféra aisément le droit de cité ; par la politesse de ses mœurs et par son instruction il mérita l’amitié du roi Ancus, à tel point qu’il passait pour avoir toute la confiance de son maître, et partager en quelque façon avec lui l’autorité royale. Il avait d’ailleurs une exquise urbanité ; il prodiguait à tous les citoyens secours, bons offices, largesses ; c’était la providence du peuple. Aussi, après la mort de Marcius, les suffrages universels portèrent au trône L. Tarquin ; car il avait ainsi remplacé le nom grec de sa famille, pour se conformer en tout aux usages d’un pays qui était devenu le sien. Dès qu’une loi eut confirmé son pouvoir, il doubla d’abord le nombre des sénateurs, appela ceux