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les causes. - Voilà les explications de Chrysippe. Ceux qui prétendent que le Destin ne détermine pas notre consentement, et qui nient en même temps que le consentement ne puisse se produire que provoqué par une perception, ceux-là soutiennent véritablement une autre thèse; mais ceux qui accordent que le consentement est toujours provoqué par la perception, et qui cependant veulent soustraire le consentement à la loi du Destin, me semblent fort n'avoir pas d'autre sentiment que Chrysippe. Celui-ci, tout en décidant que la cause prochaine et déterminante du consentement est la perception, n'accorde pas qu'elle en soit la cause nécessaire; et, lorsqu'il prétend que tout se fait par le Destin, il n'entend pas que tout arrive en vertu de causes antécédentes et nécessaires. Ceux qui, sans admettre le Destin, accordent qu'il n'y a de consentement qu'à la condition d'une perception antérieure, conviendront facilement que si l'on entend par Destin seulement la préexistence d'une cause comme condition indispensable d'un fait, à ce compte le Destin règne partout. On voit donc clairement que les deux doctrines, lorsqu'elles s'expliquent, aboutissent aux mêmes conclusions, et que si elles diffèrent dans les termes, au fond elles expriment la même pensée. Voici en peu de mots toute la question D'abord y a-t-il une distinction entre les causes? et peut-on dire que, dans certains cas, les causes préexistantes ne laissent rien en notre pouvoir, et déterminent nécessairement leurs effets; tandis que dans d'autres circonstances, malgré l'influence des causes externes, nous sommes toujours les maîtres de suivre la direction qui nous plaît? Les deux partis s'accordent à établir cette distinction; mais les uns pensent que tout ce qui se passe en nous en vertu de causes préexistantes, et sans qu'il soit en notre pouvoir d'y rien changer est l'oeuvre du Destin, tandis que ce dont nous sommes maîtres lui échappe.

[20] XX. C'est ainsi qu'il faut résoudre la difficulté, au lieu d'appeler à son aide des atomes errants et déviés. L'atome décline, dit Épicure; et d'abord pourquoi? Je sais que les atomes ont un certain mouvement d'impulsion (selon Démocrite; de gravité et de pesanteur, selon vous-même, Épicure). Quelle est donc cette nouvelle cause naturelle qui donne aux atomes un mouvement de déclinaison? Est-ce que les atomes tirent au sort pour savoir lequel déclinera, lequel conservera la ligne directe? Pourquoi cette mesure infiniment petite de déclinaison, et non pas une plus grande? et pourquoi seulement ce degré insaisissable, et non pas deux ou trois degrés? C'est là trancher les questions, mais non les résoudre; car vous n'expliquez la déclinaison de l'atome, ni par une impulsion qu'il recevrait du dehors, ni par l'influence qu'exercerait sur lui le vide dans l'immensité duquel il est emporté, ni par un changement survenu dans l'atome lui-même. Il renonce tout â coup à suivre la direction que lui imprime son mouvement naturel; pourquoi? sans raison; vous n'en donnez aucune. Et cependant Épicure croit mettre au monde quelque chose qui en vaille la peine, quand il produit cette ridicule invention qui répugne au bon sens. Pour moi, il me semble que si le Destin, et mieux encore l'aveugle fatalité, la nécessité absolue de toutes choses, ont un défenseur, et la liberté un ennemi, c'est bien ce philosophe qui déclare qu'on ne petit échapper à la fatalité qu'en recourant à cette déclinaison chimérique. Je veux