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CICÉRON.

s’était fortement opposé à la loi proposée par ce même Gracchus, pour distribuer du blé au peuple. Apres qu’elle eut passé malgré lui, il ne laissa pas, quoiqu’il eût été consul, de se mêler avec le peuple, qui allait recevoir du blé dis magasins publies. Gracchus l’ayant remarque et le voyant debout dans la foule, loi demanda tout haut comment il accordait cette démarche avec les obstacles qu’il avait apportés à cette loi ? Vraiment, lui répondit-il, j’empêcherai, tant que je pourrai, que tu ne fasses des libéralités de mon bien. Mais si tu parviens en faire, j’en demanderai ma part comme un autre. Ce digne citoyen pouvait-il censurer plus clairement cette dissipation des finances ? Usez cependant les harangues de Gracchus : vous le prendrez pour le plus sage dispensateur des deniers publies. Épicure nie qu’on puisse ire agréablement sans la vertu : il nie que la une ait prive sur le sage : il préfère la frugalité au luxe : il soutient qu’il n’y a aucun temps ou le sage ne soit heureux. Beaux discours, et dignes iu philosophe, s’ils s’accordaient avec la volupté. Mas, me répondra-t-on, il ne parle pas de la volupté que vous entendez. Tout ce qu’il lui plaira ; mais dans ce qu’il dit la volupté, je n’aperçois pas même l’ombre de la vertu. Et quand je me ferais une fausse idée de ce qu’il entend par volupté, me trompé-je aussi sur ce que c’est que douleur ? Or il me semble que le mot de vertu ne doit pas être prononcé par un homme qui met le souverain mal dans la douleur.

XXI. Quelques Épicuriens, les meilleures gens du monde, car je ne connais personne qui ait moins de malice, se plaignent que j’affecte de déclamer contre Épicure. Hé quoi ! ne dirait- on pas, que nous nous disputons quelque dignité ? Je crois le souverain bien dans les plaisirs de l’âme ; ils le croient dans ceux du corps. Je le fais consister dans la vertu ; eux dans la volupté. Là-dessus ils se mettent, aux champs : ils appellent leurs voisins à leur aide : la multitude, y accourt. Pour moi je leur déclare que je ne m’en embarrasse pas, et que je leur passerai volontiers tout ce qu’ils voudront. Est-il ici question entre nous de la guerre punique ? Caton et Lentulus furent presque toujours d’avis contraire sur cette guerre, sans que cela ait causé la moindre altération dans leur amitié. C’est, de la part des Épicuriens, prendre la chose avec trop de chaleur : surtout ayant à défendre un sentiment qui n’a rien de généreux, et pour lequel ils n’oseraient se déclarer, ni dans le sénat,, ni devant le peuple, ni à la tête d’une armée, ni devant les censeurs. Mais je me réserve à traiter ce point une autre fois, moins avec un esprit d’opiniâtreté, que dans la disposition de me rendre à la raison. J’avertirai seulement ces partisans de la volupté, que qumv ! il serait vrai que le sage, doit tout rapporter aux plaisirs des sens, ou, pour parler plus honnêtement, à sa satisfaction, et à son utilité propre, comme ces maximes ne sont pas trop plausibles, ils feront bien de s’en féliciter en secret, et d’en parler dans le monde avec moins de présomption.

XXII. Reste l’opinion de l’école de Cyrène où l’on tient que c’est quelque accident inopiné qui cause la tristesse. J’ai déjà dit qu’en cela il y avait bien du vrai. Chrysippe a été de même avis. On est, en effet, plus troublé d’une incursion imprévue des ennemis, et sur mer on est plus consterné d’une tempête subite, que quand on s’y était préparé. Mais, quoiqu’il en soit ainsi

Frugi semper contra legem frumentariam dixerat. Is lege lata omsularis ail fi umenlum accipiendum vener.it. Animadvertit Gracchus in cantione Pisonem siantem. Quaerit, audieote populo romano, qui sibi constet, cnmea lege frumenlum petat, quant dissuaserat ? Nolim, inqoil, mea bona, Graeehe, tibi oiritim dividere luxai : sed si facias, partem pelam. Parumne declarvit vir gravis, et sapiens, lege Sempronia patrimonium publicum dissipari ? Lege orationes Gracehi : patronum ærarii esse dices. Negat Epicurus jucunde posse vivi, nisi cum virtute vivatur : aegtf ullam in sapienlem vim esse fortnnœ : tenuem YKtunj aotefert copioso : negat ullum este tempus, quo npwasnon beatot ril Omuiaphilosopbodigna, sed cum ^oiuptale pngnantia. Non i^lam di<it voluptatem. Uicat quamlibet : n--iiipe eam dicit, in qua viilulis nnlla pan ‘. Age, si voluptatem non intelligimus.riedolonMn quidea jiliii eju> esse, qui dolore summum iiialuni ‘.m, DjenlMoem iaeere virtutig.

XXI. Et conqueruntur quidam Epicurei, virioplimi (nam nollum genus est minus maliliosum) me studiose dicere «Mira Epkarum. Ita credo, de honore, aut de dignitate conlendimus. Miln summum in animo bonom videtar, illi autem in corpore : miliiin vir tu te, illi in voluplate. Et illi panant : et quidem vicinorum (idem implorant. Multi autem sunl, qui statim convolent. Ego suni is, qui dicaifl me non laborare, aclum habiturum quod egerint. Quid enim ? de bello l’unie» agitur ? de quo ipso cumaliud M. Catoni, aliud L. Lentulo viderelur, nnlla inter eosconcertalio unquam fuit. Ili nimis iracunde agunt : pnesertim cum ab his non sane animosa defendatur senlenlia, pro qua non in Senalu, non in eoncione, non apud exeicilum, neque ad Censores dicere audeant. Sed cum istis alias, et eo quidem animo, nullum ut certamen instituant ; ver u m diceniibus facile cedam. Tantum admonebo : si maxime vernm rit, ad corpus omnia referre sapientem : rive, ut boneslius dicam, nibil facere, nisi quod expediat : rive omnia referre ad utilitatem suam : quoniam haec plausibilia non sunl, ut in sinu gaudeanl, yloriose loqui deri« liant.

XXII. Cyrenaicorum restat sententia : qui tum ægritudinem censent exsistere, si necopinato quid evenerit. Est id quidem magnum, ut supra dixi : etiam Chrysippo ita videri scio, quod provisum ante non sit, id ferire vehe-