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un bienfait, mais un dépôt dont il me fallait rendre compte. Tant qu’a duré mon administration en Sicile, je me suis persuadé que tout le monde avait les yeux fixés sur moi (26) ; toujours j’ai pensé que ma personne et ma questure étaient en spectacle à l’univers ; et, dans cette conviction, je me suis refusé non-seulement tout ce qui peut flatter les passions désordonnées, mais jusqu’aux douceurs dont la nature semble faire un besoin.

Aujourd’hui que je suis édile désigné, j’envisage toute l’étendue des devoirs que m’a imposés le peuple romain ; je vois qu’il me faut célébrer avec la plus grande pompe des jeux solennels en l’honneur de Cérès (27), de Bacchus et de Proserpine (28) ; rendre par une fête auguste la déesse Flore (29) propice au peuple romain, et surtout à l’ordre des plébéiens ; faire représenter avec l’appareil le plus imposant et le plus religieux, au nom de Jupiter, de Junon et de Minerve, nos jeux les plus antiques, et qui les premiers ont été appelés Romains (30) ; veiller à l’entretien des temples ; étendre mes soins sur toute la police de Rome. Je sais que, pour récompense de ces importantes et pénibles fonctions, on m’accorde le droit d’opiner un des premiers dans le sénat (31), de porter la robe prétexte, de m’asseoir sur une chaise curule (32), et de transmettre avec mes images un nom illustre (33) à la postérité. Telles sont, juges, les prérogatives que je dois mériter. Veuillent les dieux m’être favorables, comme il est vrai que, quelque doux qu’il soit pour moi de m’en voir honoré par le peuple romain, elles ne me causent pas moins de plaisir que d’inquiétude, et me font redoubler d’efforts pour que l'édilité paraisse ne pas m’avoir été donnée au hasard, et bien parce qu’il fallait qu’elle tombât sur quelqu’un, mais