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moins je n’ai rien omis volontairement. Maintenant que sa prévoyance, son activité, sa vigilance, son zèle pour la sûreté et la défense de sa province vous sont bien connus, il est essentiel, puisqu’on distingue plusieurs classes de généraux, que vous sachiez à laquelle appartient celui dont nous parlons. Oui, dans un siècle où nous avons si peu de grands capitaines, il est important que le mérite d’un capitaine de ce mérite ne reste pas plus long-temps ignoré. Ce n’est, juges, ni la prudence de Q. Maximus, ni l’activité du premier Africain, ni l’admirable sagesse du second, ni la tactique et la discipline sévère de Paul-Emile, ni l’impétuosité et la bravoure de Marius : le mérite de notre général est d’un autre genre ; et vous allez juger s’il n’est pas bien important de le conserver à la république.

La fatigue des marches est peut-être ce qu’il y a de plus pénible dans la guerre ; elle est inévitable surtout en Sicile. Apprenez, juges, combien il a su se les rendre faciles, et même agréables, par sa prévoyance et ses profondes combinaisons. D’abord il s’était occupé de l’hiver. Pour s’assurer un abri contre la rigueur du froid, la violence des tempêtes et le débordement des rivières, voilà l’expédient qu’il a imaginé. Il avait établi sa résidence à Syracuse, et vous savez que cette ville est située dans un si heureux climat, sous un ciel si pur et si serein, que l’on ne cite pas un seul jour, sans même excepter les jours d’orage, où le soleil ne se montre (16) , au moins pour quelques momens. C’était là que notre grand général vivait pendant les mois d’hiver, mais de telle façon qu’il n’était pas facile de le voir, je ne dis pas seulement hors de son palais, mais hors de son lit. Les courtes journées de cette saison se consumaient en festins, et