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l’usage. De même ici, en justice, si l’on procède aux débats conformément aux règles générales, mes adversaires pourront triompher dans leurs demandes ; mais, si l’on s’écarte de ces règles, j’aurai d’autant plus de chances de succès, que j’aurai déployé plus d’impudence. » Comme si la méchanceté, juges, pouvait avoir la même force dans les débats judiciaires que la hardiesse dans les actes de violence ! Et si alors nous crûmes devoir céder à l’audace, ce fut d’autant plus volontiers que nous comptions opposer plus facilement aujourd’hui les lois à son effronterie. Voilà pourquoi, juges(3), je vais plaider ici d’après un système tout différent de celui que j’avais d’abord adopté dans cette cause. Je mettais alors toutes mes espérances dans nos moyens de défense ; elles reposent maintenant sur les aveux de notre adversaire : j’attendais tout alors de nos témoins ; ici j’attends tout des siens. Je n’étais pas alors sans inquiétude à leur égard : sans probité, ils pouvaient faire des dépositions fausses ; reconnus gens de bien, ils pouvaient être crus sur parole. Maintenant je me sens pleinement rassuré. En effet, sont-ils d’honnêtes gens ? ils prêtent de l’appui à ma cause, puisqu’ils viennent attester, sous serment, des faits dont, sans avoir prêté serment, j’accuse notre partie adverse. Sont-ils au contraire des gens peu estimables ? ils ne peuvent me nuire : car, si on les croit, on les croira aussi sur ce qui fait l’objet de l’accusation intentée par nous ; si on ne les croit pas, leurs dépositions n’inspireront plus que de la défiance.

II. Cependant, lorsque je considère le mode de défense suivi par nos adversaires, je n’en conçois pas de plus impudent ; mais lorsque je reconnais votre hésitation à prononcer votre sentence, je crains que, sous ces dehors d’une brutale impudence, ils ne cachent quelque