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cesse présent à ma pensée. Persuadé que la vertu, au défaut de la naissance, devait le recommander au peuple romain, jaloux de fonder sa race et de transmettre son nom à la postérité, il brava les inimitiés des hommes les plus puissans, et parvint glorieusement, au milieu des contradictions, à la plus extrême vieillesse.

Après lui, Q. Pompeius, malgré la bassesse et l’obscurité de sa naissance, n’a-t-il pas dû à sa force pour braver les inimitiés, pour affronter les luttes et les périls, l’avantage de parvenir aux plus hautes magistratures ? et, presque de nos jours, n’avons-nous pas vu un C. Fimbria, un C. Marius, un C. Célius (115), lutter contre des haines et des résistances qui n’étaient assurément pas médiocres, pour s’élever à ces mêmes honneurs auxquels, vous autres nobles, vous êtes arrivés en vous jouant et sans y penser. Voilà, Romains, la route qu’il nous convient de suivre ; voilà les modèles auxquels nous devons nous attacher.

LXXI. Nous voyons jusqu’où va la jalousie, l’animosité qu’allument dans le cœur de certains nobles la vertu et l’activité des hommes nouveaux. Pour peu que nous détournions les yeux, que de pièges ils nous tendent ! pour peu que nous donnions prise au soupçon et au blâme, nous ne pouvons échapper à leurs coups : il nous faut toujours veiller, toujours agir. Eh bien ! ces haines, nous les braverons ; ces travaux, nous les entreprendrons, persuadés que les inimitiés sourdes et cachées sont plus à craindre que les haines franches et ouvertes. À peine est-il un seul noble qui soit favorable à nos efforts ; il n’est point de bon office qui puisse nous concilier leur bienveillance. On dirait qu’ils sont d’une autre nature, d’une autre espèce, tant leurs sentimens et leurs volontés sont