Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.9.djvu/181

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Juges, vous voyez des Romains jetés pêle-mêle dans les carrières ; vous voyez vos concitoyens entassés en foule dans le plus horrible gouffre. Cherchez maintenant les traces de leur sortie ; il n’en existe aucune. Tous sont-ils morts naturellement ? Quand Verrès pourrait le dire, on ne le croirait pas ; et une telle réponse ne le justifierait nullement. Mais on lit dans ces registres une expression que cet homme, aussi peu capable d’attention qu’il est ignorant, n’a pu ni remarquer ni comprendre : έδιϰώθησαν, dit-il ; et ce mot, dans la langue des Siciliens, signifie qu’ils ont été exécutés à mort (93).

LVIII. Si quelque roi, quelque république ou quelque nation étrangère, s’était permis un pareil attentat envers un citoyen romain, la république n’en tirerait-elle pas vengeance ? n’en demanderait-elle pas raison les armes à la main ? enfin pourrions-nous souffrir qu’un si grand outrage fait au nom romain demeurât impuni ? Que de guerres sanglantes n’ont pas entreprises nos ancêtres, parce qu’ils avaient appris que des citoyens romains avaient été insultés, des navigateurs emprisonnés, des négocians dépouillés ? Je ne me plains point ici de la détention de ceux dont je parle ; leur spoliation même, je la tolère : mais qu’après s’être vu enlever leurs vaisseaux, leurs esclaves, leurs marchandises, des négocians aient été mis dans les fers, des citoyens romains aient été assassinés dans un cachot, voilà le crime que je dénonce.

Si je parlais devant des Scythes, et non pas ici, en présence de tant de citoyens romains, devant l’élite des séna-