vous reprocher les hasards de la guerre ? Après tout, pour ne point s’entendre imputer les coups de la fortune, il faut du moins avoir bravé son inconstance, il faut s’être exposé à ses caprices. Mais la fortune n’a point eu de part à votre désastre. C’est sur le champ de bataille, et non pas à table, que l’on tente le sort des armes, que l’on en court les dangers. Ici nous pouvons dire que c’est de Vénus et non point de Mars que vous avez éprouvé les caprices. Si l’on ne doit pas vous imputer les torts de la fortune, pourquoi n’a-t-elle pas été à vos jeux un titre à l’indulgence lorsque vous avez jugé des hommes innocens ?
Dispensez-vous aussi de répondre que, pour vous accuser et pour vous rendre odieux, je me prévaux d’une peine établie par nos ancêtres, et que vous avez appliquée en faisant décapiter des coupables. Ce n’est point sur le genre du supplice que porte mon accusation ; je ne prétends pas qu’il ne faille jamais se servir de la hache ; je ne dis pas qu’on doive ôter à la discipline militaire le frein de la terreur, au commandement la sévérité, à la lâcheté l’opprobre du châtiment. J’avoue que très-souvent nos alliés, très-souvent même nos concitoyens et nos soldats, ont subi les châtimens les plus rigoureux. Ainsi vous pouvez encore vous épargner l’emploi de ce moyen.
LI. Oui, la faute n’en est point aux capitaines, mais à vous seul, Verrès ; je le démontre. Oui, vous avez vendu des congés aux soldats et aux rameurs ; ce fait, tous les capitaines qui ont échappé à vos fureurs l’attestent ; ce fait, la commune de Netum, notre alliée, l’atteste ; ce fait, Herbite, Amestra, Enna, Agyrone, Tyndaris, l’attestent ; ce fait, votre témoin, votre général,