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comptant sur ce vieux respect que l’on avait toujours eu pour l’ordre équestre, déclara qu’il ne paierait au décimateur que ce qui lui était dû. Ce propos fut rapporté à Apronius ; il se mit à rire, surpris que Lollius n’eût point entendu parler de l’affaire de Matrinius, ni de tant d’autres du même genre. Il lui envoie des esclaves de Vénus. Remarquez ici que le décimateur avait à ses ordres les huissiers même du préteur ; et voyez si c’est une faible preuve que Verrès usait de ces décimateurs comme de prête-noms, pour ses profits personnels. Lollius est amené ou plutôt traîné par les esclaves de Vénus devant Apronius, au moment où celui-ci, arrivant du gymnase, était mollement étendu sur un lit dans la salle à manger qu’il avait fait construire dans la place d’Etna. Lollius se trouve donc introduit au milieu de ce festin dissolu de gladiateurs. Non, juges, je le proteste, malgré la notoriété publique, je ne croirais pas ce fait, moi qui vous le raconte, si ce vieillard ne me l’eût attesté de la manière la plus positive, lorsqu’il vint me remercier, les larmes aux yeux, d’avoir bien voulu entreprendre cette accusation. Un chevalier romain, plus qu’octogénaire, est donc placé debout au festin d’Apronius. Celui-ci, tout en se frottant la tête et le visage de parfums : Eh bien ! Lollius, lui dit-il, qu’est-ce donc ? Faut-il employer la force pour vous ranger à votre devoir ? Lollius ne savait que faire. Devait-il se taire ou répondre ? Et comment parler,. dans une telle position, d’une manière convenable à son âge, à sa dignité ? Apronius, cependant, demandait qu’on servît, et quel le vin ne fût pas oublié. Les esclaves qui avaient les manières de leur maître, comme ils lui ressemblaient par la naissance, affectaient de faire passer les plats devant Lollius, et les convives de rire,