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comparez l’arrivée du préteur avec la victoire du général, la cohorte impure du premier avec l’armée invincible du second, les violences tyranniques de l’un avec la modération de l’autre, et vous verrez, dans le conquérant de Syracuse, un fondateur ; un destructeur (76) dans le magistrat à qui Syracuse paisible et florissante avait été confiée.

Je passe sous silence beaucoup de faits qui trouveront leur place ailleurs, ou dont j’ai déjà parlé dans les différentes parties de cette plaidoirie. Je ne dirai point que la place publique de Syracuse, où pas une goutte de sang ne fut répandue à l’entrée de Marcellus, a, depuis l’arrivée de Verrès, regorgé de celui d’une infinité de Siciliens innocens ; que le port de Syracuse, où jamais n’avaient pénétré nos flottes ni celles des Carthaginois, a été ouvert, sous sa préture, à un misérable brigantin de Cilicie et à d’autres pirates ; je ne rappellerai pas non plus que des jeunes gens nobles, de chastes épouses, ont subi de sa part de flétrissans outrages, que, dans la prise de leur ville, leur avaient épargnés, malgré les usages de la guerre et les droits de la victoire, la fureur et la licence du soldat ennemi. Je vais, dis-je, passer sous silence tous les excès dont pendant trois ans il a comblé la mesure ; je ne parlerai que des crimes qui ont rapport à ceux dont je m’occupe en ce moment.

Syracuse est la plus grande des villes grecques et la plus belle de toutes les cités ; vous l’avez souvent entendu dire, juges, et c’est la vérité : car, outre que sa position la rend très-forte et de difficile accès, elle présente, soit du côté de la terre, soit du côté de la mer, l’aspect le plus imposant. Ses deux ports sont renfermés dans son enceinte, presqu’au milieu de ses maisons, et sous les