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nuit obscure, des esclaves armés, ayant Timarchide à leur tête, viennent assaillir le temple. Sentinelles, gardiens, tous crient au secours. D’abord ils se mettent en défense, et tâchent de résister. Vains efforts ! ils sont repoussés à coups de bâtons et de massues ; on arrache les barres, on enfonce les portes, on se met à démolir la statue, on l’ébranle avec des leviers. Cependant, aux cris des sentinelles, le bruit s’est répandu dans toute la ville que les dieux de la patrie sont assiégés, non par des ennemis, non par des pirates brusquement débarqués, mais par une troupe d’esclaves fugitifs en armes sortis de la maison du préteur, et faisant partie de sa suite.

Tous les habitans d’Agrigente, sans en excepter les vieillards et les infirmes, réveillés, dans cette nuit fatale, par cette triste nouvelle, se levèrent aussitôt, et saisirent la première arme que le hasard jeta sous leur main. En un moment on vit toute la population accourir vers le temple. Depuis plus d’une heure un grand nombre d’hommes travaillaient à déposer la statue, sans que néanmoins elle parût le moindrement ébranlée. Les uns s’efforçaient de la soulever avec des leviers, les autres de l’entraîner avec des cordes attachées à tous les membres. Les Agrigentins arrivent tout à coup : une grêle de pierres tombe sur la troupe sacrilège, et l’on voit fuir les soldats de notre illustre général. Toutefois ils emportent deux petites statues, afin, sans doute, de ne pas retourner les mains vides vers ce ravisseur des choses sacrées. Quelque mal qu’éprouvent les Siciliens, ils ne laissent jamais échapper l’occasion d’un bon mot. Désormais, disaient-ils, ce terrible verrat doit être compté parmi les travaux d’Hercule aussi bien que le fameux sanglier d’Érymanthe.