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s’il se fût agi d’une mesure, je ne dis pas utile, mais pressante et indispensable, comme s’il en eût reçu la mission expresse du sénat et l’ordre du peuple romain, il ordonna d’ôter sans délai la statue de sa base, et de la transporter à Messine.

La chose parut révoltante à tous ceux qui étaient présens, les autres la trouvèrent incroyable. Aussi, pour ce premier moment, il n’insista point. Mais à son départ, il chargea de l’exécution de cet ordre le premier magistrat, nommé Sopater, dont vous avez entendu la déposition. Celui-ci refuse ; Verrès le menace en termes énergiques, et part. Sopater fait son rapport au sénat ; on se récrie unanimement. Cependant notre homme revient au bout de quelques jours, et, sans perdre un moment, s’informe de la statue. On lui répond que le sénat défend d’y toucher ; que même il a décrété la peine de mort contre quiconque oserait transgresser cette défense. On fait valoir en même temps le motif de la religion. « Oh ! oui, reprend Verrès, ta religion, ta peine de mort, ton sénat, tout cela ne m’importe guère. C’est fait de toi, songes-y : tu mourras sous les coups de fouet, si la statue ne m’est pas livrée. » Sopater retourne en pleurant au sénat ; il fait connaître la cruelle obstination du préteur et ses menaces. Le sénat, sans répondre à Sopater, se retire interdit et consterné. Sopater, que le préteur envoie chercher, lui rend un compte fidèle, et lui démontre qu’il est impossible de le satisfaire.

XL. Cette explication (car il ne faut omettre aucun trait de son impudence), cette explication avait lieu publiquement, sous les yeux du peuple, le préteur siégeant sur son tribunal. On était au fort de l’hiver : il faisait très-froid, et il tombait une pluie abondante, ainsi