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d’excès, cessez de mettre en question s’il est plus utile d’épargner un seul coupable, parce qu’il y en a beaucoup d’autres, ou de contenir, par le supplice d’un seul, la scélératesse d’un grand nombre.

xx XC. Et quels sont, après tout, ces nombreux exemples dont vous vous appuyez ? Car, dans une cause de cette importance, dans une accusation si grave, lorsque le défenseur commence par dire que le fait est ordinaire, les auditeurs s’attendent qu’il va leur citer des exemples pris dans les temps anciens, attestés par des monumens et par l’histoire, respectables enfin par la dignité des personnes et par l’antiquité des témoignages. Voilà ce qui donne aux exemples un caractère imposant pour les juges, et ce qui charme l’attention de l’auditoire.

Me citerez-vous les Scipion, les Caton, les Lélius (82) ? et direz-vous qu’ils ont fait comme Verrès ? Bien qu’éloigné d’approuver un tel exemple, je ne m’aviserais pas néanmoins de m’élever contre l’autorité de pareils hommes. Faute de pouvoir les citer, nommerez-vous des magistrats plus récens, un Q. Catulus le père, un C. Marius ; un Q. Scévola, un M. Scaurus, un Q. Metellus (83), qui tous ont gouverné des provinces, et ont eu à requérir du blé pour l’approvisionnement de leur maison ? Voilà des autorités bien imposantes et de nature à dissiper jusqu’au soupçon d’un délit. Mais vous ne trouverez dans ces grands hommes, qui furent presque nos contemporains, aucun exemple qui justifie l’estimation que je vous reproche. A quelle époque donc, et à quels exemples voulez-vous me rappeler ? De ces vertueux magistrats, qui gouvernaient alors la république dans un temps où les mœurs étaient pures, l’opinion publique toute-puissante, et la justice des tribunaux incorruptible, me ramènerez-vous