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nue à récuser pour juges ceux qui avaient résidé ou seulement mis le pied dans la Sicile sous votre préture, qu’il semble que vous n’ayez jamais songé qu’un jour cependant vous seriez traduit devant des juges tirés du même ordre. Et, quand même ces juges ne seraient animés contre vous du ressentiment d’aucune injure personnelle, ils n’oublieraient pas que vous les avez outragés dans la personne de leurs collègues, et que la dignité de l’ordre a été par vous méprisée, avilie. Or, pour ma part, je l’avoue, juges, un tel mépris est bien difficile à supporter avec modération. Tout affront a de mortelles blessures pour un cœur vertueux et sensible à l’honneur. Vous avez dépouillé les Siciliens : trop souvent en effet les injustices faites aux provinces demeurent impunies. Vous avez persécuté les négocians : ce n’est que malgré eux et bien rarement qu’ils viennent à Rome. Des chevaliers romains ont par vous été livrés aux vexations d’Apronius : en quoi peuvent-ils vous nuire, puisqu’ils n’ont plus le droit de rendre la justice ? Mais, lorsque c’est un sénateur que vous accablez des plus sanglans outrages, ne semblez-vous pas vous dire : Je me permets de traiter ainsi ce sénateur, afin que le titre imposant de sa dignité paraisse fait, non-seulement pour exciter la jalousie de ceux qui n’en connaissent pas les devoirs, mais pour servir de but aux insultes des mauvais citoyens ? Et ce n’est pas envers Anneius seul qu’il s’est conduit de la sorte, mais à l’égard de tous les sénateurs, afin sans doute que notre ordre parût moins un titre au respect qu’au mépris. Envers C. Cassius, cet illustre, ce courageux citoyen qui fut consul dans le temps même qui répond à la première année de la préture de Verrès, quelle conduite odieuse n’a-t-il pas