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que des gens qui devaient vous abhorrer, qui avaient reçu de vous les plus criantes injustices, aient contribué librement et par affection à votre statue, et non parce qu’ils y ont été contraints par la force et par l’autorité ? Cette exaction a dû produire des sommes considérables : je n’en ai point fait le calcul, juges, et je n’ai même pu savoir en détail à combien furent taxés les laboureurs ainsi que nos négocians établis à Syracuse, à Agrigente, à Panorme et à Lilybée : ce qu’il y a de certain, et l’aveu de Verrès lui-même le confirme, c’est que ce fut bien malgré eux qu’ils payèrent.

LXIII. J’arrive maintenant à ce qu’ont fait les cités de la Sicile : on peut aisément juger de leurs dispositions. Les Siciliens auraient-ils contribué aussi avec répugnance ? Cela n’est pas vraisemblable. Car c’est une chose constante que, Verrès sentant bien qu’il ne pouvait contenter à la fois les Siciliens et les Romains, s’est plus occupé pendant toute sa préture de ce qu’il devait à nos alliés, que de ce qui aurait pu le rendre agréable à ses concitoyens. Aussi ai-je vu en Sicile des inscriptions où il est appelé non pas seulement le patron de l’île, mais son sauveur. Que de choses dans ce mot ! Il est si expressif que la langue latine ne peut le rendre en un seul. Sauveur, veut dire celui à qui l’on doit son salut (100). On célèbre encore en son honneur des fêtes solennelles, ces brillantes Verrea, établies non pas à l’instar des fêtes de Marcellus, mais en leur place : car vous saurez que ces fêtes ont été supprimées par son ordre. Au milieu du forum de Syracuse s’élève un arc de triomphe, sur lequel le fils de Verrès est représenté nu (101) ; lui-même, sur son cheval, contemple la province qu’il a dépouillée. Ses statues se voient