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sur un hôte et sur un ami ? était-ce enfin le témoignage de votre amour que vous vouliez ainsi montrer à tous les yeux ? Ainsi font les hommes qui, livrés aux derniers excès de la dépravation, aiment du vice, non-seulement les plaisirs, mais encore le scandale, et s’étudient à laisser partout des traces de leurs infamies. Verrès était éperdument amoureux de cette hôtesse, pour laquelle il avait violé les droits de l’hospitalité : c’était peu pour lui qu’on le sût, il voulait encore en perpétuer le souvenir. Ainsi, de l’argent que lui avait valu une accusation d’Agathinus, il jugea qu’une offrande était particulièrement due à Vénus, qui avait présidé à toute l’accusation comme au jugement. Je croirais à votre reconnaissance envers les dieux, si vous aviez offert ce don à Vénus, non pas aux dépens de Sthenius, mais aux vôtres ; et vous deviez d’autant plus le faire, que cette année même vous aviez hérité de Chélidon.

Pour moi, quand tous les Siciliens ne m’auraient pas sollicité d’entreprendre cette cause, quand toute la province réunie ne m’aurait pas demandé ce service, quand mon amour et mon dévouement pour la république, et ma sollicitude pour l’honneur méconnu de notre ordre et des tribunaux, sénateurs, ne m’auraient pas forcé de le faire ; quand je n’aurais eu d’autre motif que d’avoir vu traiter par vous, Verrès, d’une manière si cruelle, si atroce et si infâme, Sthenius, un ami, un hôte, que dans ma questure j’avais singulièrement affectionné, qui m’avait inspiré la plus haute estime, et que j’avais toujours trouvé, dans ma province, jaloux, empressé d’obtenir ma confiance, n’aurais-je-pas eu encore un motif suffisant de braver l’inimitié du plus méchant des hommes, pour défendre l’existence