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déjà l’avaient acquitté de la même accusation. Mais connaissez l’audace effrontée de Verrès, qui ne daigna pas couvrir son crime d’un prétexte, ni même du voile de la dissimulation. M. Petilius, un des chevaliers romains qui composaient le tribunal, reçoit de lui l’ordre d’aller instruire une cause particulière sur laquelle il avait été chargé de prononcer. Petilius s’y refusa, parce qu’il désirait avoir pour assesseurs plusieurs de ses amis que Verrès retenait à son tribunal. Celui-ci, en homme complaisant, déclara qu’il ne prétendait retenir aucun de ceux qui voudraient servir d’assesseurs à Petilius. Tous les membres du tribunal partirent également, car les autres obtinrent la permission de ne pas rester. Ils voulaient, disaient-ils, se trouver à la cause pour l’une ou pour l’autre des parties intéressées. Le préteur se voyait donc seul avec son infâme cohorte ; et le défenseur de Sopater, Minucius, ne doutait point que Verrès, qui venait de congédier son conseil, ne persisterait pas à entendre la cause ce même jour. Tout à coup le préteur lui ordonne de parler. Devant qui ? répondit Minucius. — Devant moi, si vous me croyez capable de juger un Sicilien, un misérable Grec. — Vous en êtes bien capable, reprend Minucius ; mais j’aurais été fort aise de parler devant ceux que, tout-à-l’heure, je voyais près de vous, parce qu’ils connaissent l’affaire. — Parlez toujours, dit Verrès ; ils ne peuvent s’y trouver. — Eh bien ! s’écrie Minucius, Petilius m’a aussi prié d’être un de ses assesseurs ; et soudain il se lève du siège des défenseurs. Verrès, irrité, l’apostrophe fort durement, lui fait des menaces, et lui reproche de vouloir exciter contre lui d’odieux soupçons et la haine publique.