Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.7.djvu/353

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

On va me dire : Quel sujet de blâmer Verrès trouvez-vous en tout ceci ? Bien loin d’être un voleur, n’a-t-il pas empêché un autre de voler ? Un peu d’attention, je vous prie ; vous allez voir cet argent, qui a paru sortir de chez lui par la grande route, y revenir par un sentier détourné(50). Mais enfin que devait faire le préteur ? Il devait, après avoir examiné l’affaire dans son conseil, et acquis la conviction qu’un officier de sa suite, pour obtenir un jugement contraire au droit, à la jurisprudence, à l’équité, avait reçu de l’argent, et qu’en donnant cet argent les Bidinins avaient compromis l’existence et l’honneur du préteur ; il devait, dis-je, sévir et contre celui qui avait reçu et contre ceux qui avaient donné. Verrès, vous qui aviez déclaré que vous séviriez contre quiconque aurait mal jugé, ce qui souvent arrive par inadvertance, vous laissez impunis des gens qui, pour déterminer ou obtenir vos arrêts, ont sciemment donné ou reçu de l’argent. Volcatius, un chevalier romain, est resté auprès de vous sur le même pied qu’auparavant, lui qui avait reçu un affront si public.

XXIV. Est-il, en effet, rien de plus honteux pour un homme bien né(51), rien de plus déshonorant pour un homme libre, que d’être forcé par le magistrat de restituer un vol au milieu d’une assemblée nombreuse ? Volcatius eût-il eu dans le cœur les sentimens que doit avoir non-seulement un chevalier romain, mais tout homme libre, il n’aurait pu, après un tel affront, vous regarder désormais en face, il serait devenu votre ennemi, votre ennemi mortel, s’il n’avait pas agi de concert avec vous, s’il ne s’était pas occupé de votre réputation plus que de la sienne ? Et cependant il s’est montré votre ami