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SECONDE ACTION CONTRE VERRÈS, II

ceux qui par leur naissance ou par leur position tiennent le premier rang dans la province sont venus de toutes les parties de l’île, soit au nom de leurs cités, soit en leur propre nom ; les villes les plus considérables et les plus illustres furent celles aussi qui ont sollicité avec le plus d instances la poursuite des injustices qu’elles avaient souffertes Mais apprenez, juges, quels obstacles il leur fallut braver ! Car je crois devoir parler ici pour les Siciliens plus librement qu’ils ne le voudraient peut-être eux mêmes ; je dois consulter leur intérêt plutôt que leur délicatesse. Jamais, croyez moi, dans aucune province, un accusé absent n’a été protégé contre les enquêtes d’un accusateur avec autant de force et de passion. Les questeurs de l’une et l’autre province (9), sous sa présure, ont cherché à m’intimider en se présentant devant moi avec leurs faisceaux. Ceux qui leur succédèrent, pleins de reconnaissance pour le traitement splendide et généreux qu’ils en avaient reçu ne se montrèrent pas moins ardens contre moi. Jugez ce qu’a pu faire un homme qui, dans la même province, a trouvé quatre questeurs (10) pour défendre avec tant de dévouement ses intérêts, et pour qui le préteur et tous les gens de sa suite ont signalé tant de zèle qu’on eût pu croire qu’ils regardaient comme leur province, non la Sicile au dénûment de laquelle ils insultaient, mais Verrès lui-même qui en était sorti gorgé de butin. Ils menaçaient les Siciliens pour avoir décrété des députations chargées de parler contre Verras ; ils menaçaient les députés qui voulaient partir ; à d’autres, pour faire son éloge, les plus grandes faveurs furent promises ; les témoins les plus importans de ses délits particuliers, dont j’avais officiellement réclamé la présence, furent retenus de force et gardés en prison.