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bliront qu’à l’égard de cette flotte, destinée à combattre les pirates, Verres s’est comporté comme le plus scélérat des pirates.

XXXVI. C. Malleolus, questeur de Cn. Dolabella, avait péri misérablement(128) ; Verrès crut voir dans cette mort deux successions qui lui arrivaient : d’abord, une vice-questure, car Dolabella le chargea aussitôt d’en faire les fonctions ; ensuite une tutelle, car, se trouvant tuteur du fils de Malleolus, il fit main-basse sur les biens de son pupille. En effet, Malleolus, en partant pour la Cilicie, n’avait laissé presque rien à Rome ; il avait d’ailleurs, dans la province, placé des sommes considérables, et s’était fait faire beaucoup d’obligations. Il avait ramassé une immense quantité d’argenterie du travail le plus précieux ; car, intime ami de Verrès, Malleolus avait la même passion, la même manie des belles choses : il laissa donc à sa mort une très riche argenterie, puis un grand nombre d’esclaves, parmi lesquels se trouvaient beaucoup d’artistes et de jeunes gens d’une grande beauté. Verrès prit parmi l’argenterie tout ce qui lui plut, choisit les esclaves qui lui convenaient, fit transporter chez lui les vins et toutes les autres denrées que l’on se procure à bon compte en Asie, vendit le reste, et le fit payer comptant : la vente avait produit deux millions cinq cent mille sesterces. Quoique ce fût un fait constant, il revint à Rome sans donner un mot de reconnaissance ni à son pupille, ni à sa mère, ni à ses tuteurs ; quant aux esclaves d’élite qui appartenaient à son pupille, il garda dans sa maison, et près de sa personne, cette belle et savante jeunesse(129), disant qu’ils étaient à lui et qu’il les avait achetés. La mère et l’aïeule de l’enfant l’ayant sollicité, s’il ne rendait ni l’argent ni ses comptes, de faire connaître au moins