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cette cause, ce n’est qu’en cédant à la volonté absolue, à l’impatience du peuple romain, que je me présente, non pour envenimer la haine que l’on porte à votre ordre, mais pour alléger le poids d’une honte commune. J’amène devant vous un homme à l’occasion duquel vous pourriez rendre à vos jugements la considération qu’ils ont perdue, rentrer en grâce auprès du peuple romain, et donner satisfaction aux nations étrangères. Cet homme est le déprédateur du trésor public(2), l’oppresseur de l’Asie et de la Pamphylie(3), le violateur éhonté de la justice(4) dans Rome, la plaie et le fléau de la Sicile. Si vous le jugez avec une sévérité conforme à votre serment, cette autorité qui doit résider dans vos mains n’en sortira pas ; mais, si les immenses richesses de l’accusé étouffent dans les tribunaux la voix de la conscience, mon zèle aura du moins pour résultat de montrer au grand jour que si la république ne trouve point un tribunal vengeur, ce n’aura pas été faute d’accusé pour les juges et d’accusateur pour le coupable.

II. Quant à moi, s’il m’est permis de vous en faire l’aveu, C. Verrès m’a tendu, sur terre et sur mer, bien des embûches auxquelles j’ai échappé par ma vigilance, ou par le zèle actif de mes amis. J’avouerai cependant que jamais je ne me suis cru exposé à d’aussi grands dangers, jamais je n’ai conçu de craintes aussi vives qu’aujourd’hui, dans cette audience même. Et quelque trouble que me causent l’attente où l’on est de mon accusation, et le concours d’un si grand nombre de citoyens, j’en suis moins tourmenté que des efforts coupables que fait l’accusé pour compromettre, en même temps, vous, moi(5), le préteur Man. Glabrion(6), les alliés, les nations étrangères, votre ordre, enfin le nom de sénateur. Il dit avec insolence